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pourquoi la plûpart des moralistes ont été si peu d’accord sur les objets dans lesquels ils ont fait consister le bonheur, ainsi que sur les moyens de les obtenir. Cependant le bonheur paroît être en général un état durable ou momentané auquel nous acquiesçons, parce que nous le trouvons conforme à notre être ; cet état résulte de l’accord qui se trouve entre l’homme & les circonstances dans lesquelles la nature l’a placé ; ou si l’on veut le bonheur est la coordination de l’homme avec les causes qui agissent sur lui.

Les idées que les hommes se font du bonheur dépendent non seulement de leur tempérament ou de leur conformation particulière, mais encore des habitudes qu’ils ont contractées. L’habitude est dans l’homme une façon d’être, de penser & d’agir que nos organes tant extérieurs qu’intérieurs contractent par la fréquence des mêmes mouvemens, d’où résulte le pouvoir de faire ces mouvemens avec promptitude & facilité.

Si nous considérons attentivement les choses, nous trouverons que presque toute notre conduite, le systême de nos actions, nos occupations, nos liaisons, nos études & nos amusemens, nos manieres & nos usages, nos vêtemens, nos alimens, sont des effets de l’habitude. Nous lui devons pareillement l’exercice facile de nos facultés mentales, de la pensée, du jugement, de l’esprit, de la raison, du goût, etc. C’est à l’habitude que nous devons la plûpart de nos penchans, de nos desirs, de nos opinions, de nos préjugés ; les fausses idées que nous nous faisons du bien-être, en un mot les erreurs dans lesquelles tout s’efforce de nous faire tomber & de nous retenir.