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tion rend l’homme susceptible ; quoique des causes tant intérieures qu’extérieures agissent continuement sur lui ; il ne sent pas toujours d’une maniere distincte ou marquée les impressions qui se font sur ses organes, il ne les sent que lorsqu’elles ont produit un changement ou quelque secousse dans son cerveau. C’est ainsi que, quoique l’air nous environne de toutes parts, nous ne sentons son action que lorsqu’il est modifié de façon à frapper avec assez de force nos organes & notre peau pour que notre cerveau soit averti de sa présence. C’est ainsi que dans un sommeil profond & tranquille, qui n’est troublé par aucun rêve, l’homme cesse de sentir : enfin c’est ainsi que malgré les mouvemens continuels qui se font dans la machine humaine, l’homme paroit ne rien sentir, lorsque tous ces mouvemens se font dans un ordre convenable ; il ne s’apperçoit pas de l’état de santé, mais il s’apperçoit de l’état de douleur ou de maladie, parce que dans l’un son cerveau n’est point trop vivement remué, au lieu que dans l’autre ses nerfs éprouvent des contractions, des secousses, des mouvemens violens & désordonnés qui l’avertissent que quelque cause agit fortement sur eux, & d’une façon peu analogue à leur nature habituelle ; voilà ce qui constitue la façon d’être que nous nommons douleur.

D’un autre côté il arrive quelquefois que des objets extérieurs produisent des changemens très considérables sur notre corps, sans que nous nous en appercevions au moment où ils se font. Souvent dans la chaleur d’un combat un soldat ne s’apperçoit point d’une blessure dangereuse, parce qu’alors les mouvemens impétueux, multipliés & rapides dont son cerveau est assailli, l’empêchent