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cher les difficultés prétendent que l’espece humaine descend d’un premier homme & d’une premiere femme, créés par la divinité, que nous avons quelques idées de la nature & que nous n’en avons aucune de la divinité ni de la création, & que se servir de ces mots c’est dire en d’autres termes que l’on ignore l’énergie de la nature & qu’on ne sçait point comment elle a pu produire les hommes que nous voyons.[1]

Concluons donc que l’homme n’a point de raisons pour se croire un être privilégié dans la nature ; il est sujet aux mêmes vicissitudes que toutes ses autres productions. Ses prétendues prérogatives ne sont fondées que sur une erreur. Qu’il s’élève par la pensée au dessus du globe qu’il habite & il envisagera son espece du même œil que tous les autres êtres : il verra que, de même que chaque arbre produit des fruits en raison de son espece, chaque homme agit en raison de son énergie particulière & produit des fruits, des actions, des ouvrages également nécessaires. Il sentira que l’illusion qui le prévient en faveur de lui-même vient de ce qu’il est spectateur à la fois & partie de l’univers. Il reconnoîtra que l’idée d’excellence qu’il attache à son être n’a d’autre fondement que son intérêt propre & la prédilection qu’il a pour lui-même.

  1. Ut tragici poëtæ confugiunt ad Deum aliquem, cum aliter explicare argumenti exitum non possunt. Cicero de divinatione Lib. II. Il dit encore : magma stultitia est earum rerum Deos facere effectores, causas rerum non quarere. Ibidem.