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tombés sur lui, vit un jeune homme pâle comme la mort et qui semblait en proie à une extrême douleur. Il regardait fixement de son côté tout en jouant des coudes et des poings. À la fin il parvint jusqu’à la portière de la voiture qu’il ouvrit brusquement, jeta un billet sur les genoux de Mlle de Scudéri et disparut comme il était venu, au milieu d’une pluie de coups et d’injures.

La Martinière qui accompagnait sa maîtresse, avait poussé un cri d’horreur en voyant l’inconnu. Mlle de Scudéri s’évertuait en vain à tiret le cordon pour appeler le cocher ; celui-ci, comme s’il eut obéi à quelque mauvais génie, fouettait à tour de bras ses chevaux qui, l’écume à la bouche, se cabrèrent et traversèrent le pont au galop. Mlle de Scudéri répandit le contenu de son flacon d’odeurs sur la femme de chambre évanouie qui finit par ouvrir les yeux, et tremblante, le visage convulsé par la peur, se serra contre sa maîtresse en balbutiant :

— Sainte Vierge, que voulait donc ce terrible homme ? Ah ! c’était lui, oui, lui-même qui dans cette affreuse nuit vous apporta la cassette.

Mlle de Scudéri tâcha de rassurer la pauvre femme en lui disant qu’il n’était arrivé aucun malheur et qu’il fallait avant tout savoir ce que contenait ce billet. Elle déploya donc le papier et y lut les mots suivants :

« La fatalité que vous seule pouvez détourner me pousse dans l’abîme. Je vous supplie, comme l’enfant supplie sa