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CONTES POSTHUMES.

guères écouter quelque chose de plus comique que le récit qu’Hoffmann nous fit plus tard, gesticulant comme un vrai acteur, de l’histoire de la débâcle générale.

La situation de notre Hoffmann n’était alors cependant pas aussi plaisante qu’il sut la représenter plus tard ; il n’avait ni existence, ni moyen de s’en créer, Pendant quelque temps, il se laissa remorquer par quelques jeunes gens riches qu’il payait par ses causeries toujours spirituelles et gaies. Si même une telle situation avait pu durer, il ne l’aurait pas supportée ; son noble caractère, son intelligence supérieure ne le permettaient point, C’est alors qu’il écrivit sa lettre au rédacteur du Journal musical de Leipzig ; je dirigeais cette gazette, mais Hoffmann m’était complètement inconnu, même de nom, Je possède encore cette lettre ; elle est pleine d’esprit, écrite d’un style brillant et gai, comme tout ce qu’Hoffmann a écrit.

Il y raconte toute sa vie telle que je viens de l’esquisser, sa dernière catastrophe, son embarras de n’avoir rien, de ne rien être, de ne pas savoir où aller, que devenir. Sa lettre termine du même ton gai et spirituel par la demande adressée au rédacteur du journal, de lui conseiller ce qu’il devait faire, a car, dit-il, il est clair qu’il fallait faire quelque chose et sur-le-champ ; la faim fait mal, au moins à sa femme, » « Seulement, continuait-il, il ne subirait pas le plus grand malheur, celui d’accepter de l’argent qu’il n’eût gagné ; mais qu’il voulait travailler, faire tout, même écrire ce que l’on nomme des inutilités, ou ce qui l’est à peu près, c’est-à-dire de composer de la musique ; qu’il envoyait en même temps son Requiem comme échan-