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génie. C’est la maison faisant le coin que mon cousin habite, et de la fenêtre d’un petit cabinet, il embrasse d’un seul regard tout le panorama de cette place grandiose.[1] C’était justement un jour de marché que, perçant à travers la foule, j’arrivai au bas de la rue d’où l’on aperçoit de fort loin la fenêtre du coin de mon cousin. Mon étonnement ne fut pas mince quand je vis reluire à cette fenêtre la petite calotte rouge que mon cousin portait dans son bon temps. Bien plus, en m’approchant davantage, je remarquai que mon cousin avait endossé sa magnifique robe de chambre de Varsovie et qu’il fumait dans sa pipe turque des dimanches. — Je lui fis signe, j’agitai mon mouchoir de poche et je réussis à attirer sur moi son attention. Il me répondit amicalement de la tête : Que d’espérances ! Rapide comme l’éclair, je grimpai l’escalier ; l’invalide ouvrit la porte, sa figure d’ordinaire ridée, plissée, pareille à un gant qui a été mouillé, semblait avoir été touchée par un rayon de soleil, et était devenue un masque presque aimable. Il dit qu’il croyait que Monsieur était dans son fauteuil, et qu’on pouvait lui parler. La chambre était faite, et sur le paravent du lit on voyait attachée une feuille de papier, où se lisaient ces mots écrits en grosses lettres :

Et si male nunc, non olim sic erit.[2]

Tout indiquait l’espérance revenue, la force vitale ressuscitée. « Ah ! te voilà donc enfin, me cria mon cousin comme j’entrais dans le cabinet ; ah ! te voilà donc

  1. Fidèle peinture de la chambre d’Hoffmann. (Note d’Hitzig)
  2. Et si maintenant le mal se fait sentir, il n’en sera pas toujours ainsi.