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Sur le point de retourner dans sa chambre, après cette expédition, elle traversait le vestibule, lorsqu’elle entendit un cliquetis etl un bruit de pas. Elle regarda autour d’elle, et aperçut un officier en grand uniforme de la garde impériale française qui portait le bras gauche en écharpe.

— Stanislas ! mon Stanislas ! cria-t-elle en s’élançant vers lui et tombant sans connaissance entre ses bras.

L’officier stupéfait, cloué à la terre par la surprise, eut de la peine à retenir, avec le seul bras dont il pût se servir, Herménégilde, qui, grande et bien nourrie, était loin d’être un léger fardeau ; il la pressa contre son sein avec une force toujours croissante, et en sentant le cœur de la jeune fille battre près du sien il dut s’avouer que c’était la plus délicieuse aventure qui lui fût jamais arrivée.

Les minutes s’écoulaient rapidement ; l’officier fut embrasé des feux du désir, dont les milliers d’étincelles électriques jaillissaient du corps charmant qu’il tenait entre ses bras, et il appuya ses lèvres brûlantes sur les douces lèvres d’Herménégilde. Ce fut ainsi que les trouva le comte Népomucène, qui sortait de sa chambre.

En ce moment Herménégilde reprit ses sens, embrassa l’officier avec ardeur, et s’écria de nouveau dans son délire :

— Stanislas ! mon bien-aimé ! mon époux !

L’officier, le visage brillant, tremblant, perdant toute contenance, fit un pas en arrière, et se déroba doucement à l’étreinte convulsive d’Herménégilde.

— C’est le plus doux moment de ma vie, balbutia-t-il timidement, mais je ne veux pas jouir d’un bonheur qu’une erreur seule me procure. Je ne suis pas Stanislas ! hélas ! je ne le suis pas !

À ces mots, Herménégilde épouvantée bondit en arrière ; elle regarda l’officier d’un œil fixe et perçant, se convainquit qu’elle avait été trompée par l’étonnante ressemblance de l’officier avec son amant, et s’éloigna en gémissant.

L’officier se fit connaître pour le comte Xavier de Ramskay, cousin de Stanislas. Le comte Népomucène pouvait à peine croire possible qu’en si peu de temps celui qu’il avait vu enfant fût devenu un jeune homme grand et robuste. À la vérité, les fatigues de la guerre avaient donné un caractère mâle à son visage et à tout son extérieur.

Le comte Xavier avait quitté sa patrie avec son cousin et son ami