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trument dont les cordes résonnèrent avec des grincements aigus.

« Ah ! brailla Capuzzi, il y a encore des lois à Rome. — En prison, en prison ! je vous ferai plonger dans le plus profond des cachots ! » Et en grondant et en se débattant il voulait se précipiter dehors.

Mais Salvator le prit vigoureusement par les deux bras, le poussa dans un fauteuil, et lui dit d’une voix enjouée : « Eh, mon doux signor Pasquale, ne voyez-vous que ce n’est que pour plaisanter ? Vous allez recevoir, non pas dix, mais trente ducats pour votre épinette. » Et il répéta si souvent : « trente ducats, bien comptès, bien contrôlés, » que Capuzzi finit par dire, d’une voix éteinte et étouffée : — « Que dites-vous, mon cher Signor ? trente ducats pour l’épinette et en l’état où elle est ? » — Alors Salvator lâcha prise et lui déclara, en s’engageant sur l’honneur, que l’épinette, avant une heure, vaudrait trente, quarante ducats, et que Capuzzi les toucherait bel et bien.

Le vieillard soupira profondément, et, reprenant haleine, il marmottait : « trente ducats, quarante ! puis, s’adressant au peintre : Mais signor Salvator, dit-il, c’est que vous m’avez fortement chagriné. — Trente ducats ! » répéta Salvator. — Le vieux sourit, mais il reprit : « Oh ! vous m’avez touché au cœur. — Trente ducats, interrompit de nouveau Salvator, trente ducats ! » et il le répéta tant de fois aux oreilles de Capuzzi, que celui-ci, tout en affectant de faire la moue, finalement dit, tout content : « Mon cher Signor ! si je peux recevoir pour mon épinette trente ou quarante ducats, tout sera pardonné et oublié.