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membres, écarquillant les yeux et humant l’air bruyamment, comme si l’haleine lui manquait. Mais Salvator s’empressa de l’aborder, lui prit les deux mains et s’écria : « Mon digne signor Pasquale ! combien je suis honoré de votre présence dans ce chétif réduit ; — certes, c’est l’amour de l’art qui vous y amène : vous voulez voir mes plus récents ouvrages, peut-être même m’en commander un ? — Parlez, mon cher signor Pasquale, en quoi puis-je vous être agréable ?

« J’ai à vous entretenir, mon cher signor Salvator, bégayait Capuzzi avec peine, mais seulement tête-à- tête. Permettez donc que je me retire pour revenir dans un moment plus opportun. — Point du tout, disait Salvator, en retenant le vieux d’une main ferme, mon cher Signor, vous ne me quitterez pas. Vous ne pouviez arriver ici plus à propos ; car un aussi grand partisan du noble art de la peiuture que vous, un ami de tous les artistes distingués, sera charmé assurément que je lui présente ici le premier peintre de notre époque, Antonio Scacciati, dont le tableau merveilleux, la ravissante Madeleine aux pieds du Christ, provoque dans Rome entière tant d’admiration et d’enthousiasme ! et vous-même, je le parie, êtes plein des mêmes transports, et vous brûliez, à coup sûr, de connaitre l’auteur de ce chef- d’œuvre. »

Un violent tremblement s’empara du vieillard ; le frisson de la fièvre le glaçait, et ses regards enflammés de colère dévoraient le pauvre Antonio, mais lui s’avança droit à son encontre, s’inclina d’un air