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grand éclat de rire. « Quoi ? lâche compagnon ! dit-il, tu oses me braver, tu prétends te soustraire à mes ordres, à ma puissance : n’es-tu pas depuis longtemps notre associé ? ne vis-tu pas de notre argent depuis près de trois ans ? ta femme ne se pare-t-elle pas du fruit de nos vols ? Maintenant tu es avec nous, et tu refuses de nous servir quand tu partages nos profits ?… Si tu ne nous suis pas, si tu n’agis pas sur le champ comme un résolu compagnon, je te fais jeter enchaîné au fond de notre caverne, et mes hommes iront incendier ta maison et tuer ta femme et ton enfant. Mais j’espère qu’il n’en faudra pas venir à cette extrémité qui ne serait que la conséquence de ton obstination. — Eh bien, choisis ! il est temps : il faut que nous partions. »

Andrès vit clairement que la moindre hèsitation de sa part pouvait coûter la vie à son enfant et à sa chère Giorgina. Tout en maudissant donc, et vouant, à part soi, aux flammes de l’enfer le traître et infâme Denner, il prit le parti de se soumettre en apparence à sa volonté, bien résolu à rester pur de meurtre ou de vol, et à profiter seulement de son admission dans les repaires des brigands pour faire opérer plus sûrement leur arrestation à la première occasion favorable. Après avoir pris tacitement cette détermination, il déclara donc, que, malgré son premier mouvement de répugnance, il se croyait engagé, par reconnaissance pour le sauveur de sa femme, à prêter à Denner son assistance, et qu’il consentait à marcher avec eux, priant toutefois qu’on lui épargnât, en qualité de novice, toute