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à pas précipités. Ils avaient pénétré dans la futaie assez avant. Arrivés à une clairière d’une certaine étendue, Denner siffla à trois reprises, et les échos des cavernes voisines répétèrent ce bruit sinistre. Soudain des torches flamboyantes apparurent de tous côtés, un sourd craquement de pas et d’armes retentit dans les broussailles, et il se forma bientôt à une certaine distance de Denner un cercle de figures noires, farouches, semblables à des spectres. L’un deux s’avança de quelques pas, et dit en désignant Andrès : « Voilà, sans doute, notre nouveau camarade : n’est-ce pas, capitaine ! — Oui, répondit Denner, je viens de le faire lever, il faut qu’il fasse son coup d’essai ; on peut se mettre en marche, allons ! »

Andrès, à ces mots, se réveilla comme d’un étourdissement confus. Une sueur froide inondait son front ; mais il reprit contenance et s’écria avec fureur : « Quoi ! misérable imposteur, tu te donnais pour un marchand, et tu fais cet horrible et criminel métier, et tu es un infâme brigand ? jamais je ne serai ton complice, et je ne prendrai part à tes crimes malgré l’artifice indigne et diabolique que tu as employé, en véritable Satan, pour me séduire. — Laisse-moi partir sur le champ, scélérat maudit ! et fuis avec ta bande de cette contrée : sinon, je découvrirai tes repaires à la justice et tu recevras le digne prix de tes forfaits ; car je n’en puis plus douter, je vois en toi l’affreux Ignace, le chef des brigands qui ont dévasté la frontière, et commis tant de pillages et de meurtres. Laisse-moi le champ libre, te dis-je : que je cesse à jamais de te voir ! » — Denner partit d’un