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les massifs. Il voulait découpler ses dogues, mais Denner s’écria : « Gardez-vous-en bien, mon ami ! — car je puis vous assurer que nous n’avons pas la moindre chose à craindre. » À peine avait-il dit ces mots, qu’un grand gaillard tout noir, armé d’un fusil, avec de longues moustaches et les cheveux hérissés, sortit du taillis à quelques pas seulement devant eux. Andrès s’apprêtait à faire feu : « Ne tirez pas, ne tirez pas ! » s’écria Denner. — Le grand coquin noir répondit par un signe de tête amical, et se perdit dans le fourré. — Enfin ils se trouvèrent hors du bois sur la grande route. « Maintenant je vous remercie cordialement de votre bonne conduite, dit Denner ; retournez donc à votre demeure : si vous rencontriez encore quelques visages pareils à celui que nous avons vu, poursuivez tranquillement votre chemin sans vous en inquiéter. N’ayez pas l’air d’y faire attention, retenez vos dogues à la corde, et vous arriverez chez vous sans nul encombre. » — Andrès ne savait que penser de tout cela, et de cet étrange marchand, qui, comme un vrai conjurateur d’esprits, semblait maître de chasser et de bannir bien loin les malfaiteurs ; et il ne pouvait concevoir pourquoi il s’était fait accompagner à travers la forêt. Enfin, il se remit bravement en marche et, sans avoir fait aucune rencontre suspecte, il arriva sain et sauf à son logis, où sa Giorgina, qui avait quitté le lit, forte et alerte, le reçut à bras ouverts avec un plaisir extrême.

Le petit ménage d’Andrès prit un tout autre aspect, grâce à la générosité du marchand. En effet,