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Un soir, assis près du lit de Giorgina, il contemplait d’un regard fixe sa femme si tendrement chérie et que son épuisement extreme laissait à peine respirer. Dans sa douleur sombre et muette, il avait saisi sa main et était sourd aux gémissements de l’enfant qui languissait exténué par la privation d’aliments. Le valet était parti dès le matin pour Fulda, afin de rapporter en échange de la dernière épargne, quelque soulagement à la pauvre malade. Il n’y avait à deux lieues à la ronde nulle consolation à attendre d’un être humain. L’ouragan seul, avec des sifflements aigus, grondait à travers les noirs sapins d’une voix menaçante, et les dogues poussaient des cris lamentables comme s’ils eussent déploré la profonde infortune de leur maître. — Andrès entendit tout-à-coup résonner comme des pas humains devant la maison. Il crut que c’était son valet qui était de retour, quoiqu’il ne dût pas l’attendre aussi tôt ; mais les chiens s’élancèrent dehors en aboyant violemment : ce devait être un étranger.

Andrès alla lui-même devant la porte. Un homme grand et sec vint alors à sa rencontre, enveloppé dans un manteau gris, et la figure enfoncée sous son bonnet de voyage.

« Eh ! dit l’étranger, comme je me suis pourtant égaré dans le bois ! voici l’orage qui descend des montagnes, et nous allons avoir un temps épouvantable. Me permettriez-vous, cher Monsieur, d’entrer dans votre demeure, afin de me délasser de la fatigue de la route, et de reprendre des forces pour le