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affreux pressentiment s’empara de son esprit. Il vola en haut de la tour : la porte du second escalier était fermée ; Clara poussa un cri de désespoir plus déchirant… Presque fou de fureur et d’effroi, il se rue contre la porte qui cède enfin. Les cris de Clara devenaient de plus en plus faibles : « Au secours !… à moi ! à moi !… » et la voix se perdit dans les airs. — « Elle est morte, ce forcené l’a tuée ! » s’écria Lothaire. La porte de la galerie était également fermée : la rage lui donne une force surhumaine, il fait sauter la porte de ses gonds… Dieu du ciel ! Clara, soulevée par le furieux Nathanael, était suspendue dans les airs en dehors de la balustrade, et n’étreignait plus que d’une seule de ses mains un barreau de fer. Prompt comme l’éclair, Lothaire saisit sa sœur, rentre son corps sur la plate-forme, et assène en même temps son poing fermé sur le visage du frénétique qui, lâchant sa proie de mort, recula en chancelant.

Lothaire descendit précipitamment, tenant dans ses bras sa sœur évanouie ; — elle était sauvée. — Cependant Nathanael se démenait tout autour de la galerie et faisait des bonds prodigieux en criant : « Cercle de feu, tourne ! — cercle de feu, tourne ! » — La foule accourut à ces cris sauvages ; au milieu d’elle surgissait comme un colosse l’avocat Coppelius, qui venait d’arriver dans la ville et s’était dirigé tout droit vers le marché. On voulait monter à la tour pour s’emparer du furieux. Coppelius se mit à rire en disant : « Ah ! ah ! attendez : celui-là descendra tout seul. » Et il regarda en haut comme tout le