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romans ; et chaque jour, il y ajoutait une multitude de sonnets, de stances, de ballades fantastiques qu’il lisait et relisait à Olympie durant des matinées entières, sans se lasser et sans discontinuer. Mais aussi c’est qu’il n’avait jamais eu un auditeur aussi excellent. — Olympie ne brodait ni ne tricotait, elle ne regardait pas à la fenêtre, elle ne donnait pas à manger à un petit oiseau, elle ne jouait pas avec un petit bichon, elle ne roulait pas dans ses doigts de petites bandes de papier, ni rien autre chose, elle n’avait jamais besoin de comprimer un baillement par une petite toux forcée. — Bref, elle regardait son amant dans les yeux, durant des heures d’horloge, dans une attitude fixe et immuable, sans bouger, sans souffler, et son regard s’animait toujours de plus de vivacité et d’ardeur. Seulement, lorsqu’enfin Nathanael se levait et lui baisait la main ou même la bouche, elle disait : « Ha ! — ha ! » et puis après : « Bonne nuit, mon cher !  »

« Oh ! âme sublime et profonde ! s’écriait Nathanael seul dans sa chambre, ce n’est que par toi, par toi seule que j’ai été compris. » Il tressaillait d’un ravissement intérieur en songeant à l’accord merveilleux qui se manifestait de jour en jour davantage entre son cœur et celui d’Olympie ; car il lui semblait qu’Olympie eût exprimé sur ses œuvres, sur sa faculté poétique, ses pensées intimes, et cela par l’organe de sa propre parole à lui, Nathanael. Il ne pouvait guère, en effet, en être autrement ; car Olympie ne prononçait jamais un mot de plus que ce que nous avons rapporté. Alors même que Na-