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Rien ne me plaisait davantage que d’entendre ou de lire des histoires effrayantes d’esprits, de sorcières, de nains, etc. ; mais au-dessus de tout, dominait toujours l’homme au sable, que je dessinais avec de la craie ou du charbon sur les tables, sur les armoires, sur les murs, partout, sous les figures les plus singulières et les plus horribles.

» Lorsque j’eus atteint l’âge de dix ans, ma mère me retira de la chambre des enfants, et m’installa dans une petite pièce qui donnait sur un corridor, non loin du cabinet de mon père. Nous étions encore toujours tenus de nous retirer promptement, quand, au coup de neuf heures, l’inconnu se faisait entendre dans la maison. Je reconnaissais de ma petite chambre quand il entrait chez mon père, et bientôt après, il me semblait qu’une vapeur subtile et d’une odeur singulière se répandait dans les appartements. Avec la curiosité, je sentais s’accroître aussi en moi le courage de faire, d’une manière ou d’autre, la connaissance de l’homme au sable. Souvent je me glissai avec vitesse de ma chambre dans le corridor, après que ma mère s’était éloignée, mais sans rien pouvoir découvrir ; car toujours l’homme au sable était entré lorsque j’atteignais la place d’où j’aurais pu le voir au passage. Enfin, cédant à une impulsion irrésistible, je résolus de me cacher dans la chambre même de mon père, et d’y attendre l’arrivée de l’homme au sable.

» Un jour, au silence de mon père et à la tristesse de ma mère, je pressentis que l’homme au sable viendrait ; je prétextai donc une grande lassitude