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l’objet, les réfute de la manière la plus sensée en faveur de Salvator Rosa, au commencement du conte de Formica, en établissant nettement, entre la vie intellectuelle et la vie positive de l’artiste, une démarcation qui présente toujours, en effet, plutôt des contrastes frappants que des analogies incertaines. C’est ainsi que Sterne, pour ne parler que des écrivains anglais, Sterne, ce peintre inimitable des secrets mouvements du cœur, des vives et fugitives émotions de l’âme, n’avait nul épanchement, nulle mansuétude dans ses relations sociales et était à-peu-prèsdénué de sensibilité pratique. Il serait difficile de deviner l’auteur de Gulliver au récit de la vie agitée du Doyen de Saint-Patrick, et l’on n’eût jamais cru, en voyant le Révérend Maturin dépasser, par sa jovialité et son amour du plaisir, les jeunes gens les moins réservés, que cet esprit mondain fût le créateur des sombres peintures de Melmoth et de Bertram.

Contentons-nous donc d’apprécier le génie du poète d’aprés ses œuvres sans vouloir en tirer l’horoscope fictif de son existence. Du reste, comme nous l’avons déjà dit, nous sommes loin d’envisager les œuvres d’Hoffmann comme aussi fantastiques et autant invraisemblables qu’on est habitué à le faire, et d’ailleurs, le véritable côté surnaturel de ses contes, qui a tant séduit les uns ou choqué les autres, ne nous semble pas en être le cachet distinctif ni le titre le plus valable à la réputation qu’ils ont conquise. À vrai dire, ces fantaisies purement imaginaires n’exciteront jamais la sympathie générale comme celles de