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teur. Celui-ci pensa qu’un homme aussi recommandable devait faire l’ornement de sa cour, et il lui lit demander s’il y accepterait volontiers un emploi.

Mais l’étranger lui écrivit en réponse, sur un parchemin portant une aune et demie en long et en large, et avec des caractères rouges comme le cinabre, qu’il le remerciait très-humblement de l’honneur qu’il voulait lui conférer, mais qu’il le suppliait, comme très-haut et très-puissant seigneur, de lui accorder la faveur de jouir librement de la vie paisible de bourgeois, qu’il affectionnait par-dessus tout ; qu’il avait choisi le séjour de Berlin de préférence à bien d’autres villes, parce qu’il n’avait rencontré nulle part des hommes aussi aimables, autant de pureté et de loyauté dans les mœurs, ni un penchant à la franche gaîté aussi conforme à son humeur et à sa manière de vivre.

L’électeur et ses courtisans admirèrent l’élégance du style de la lettre de l’étranger, et cette affaire n’eut pas d’autres suites.

Mais il arriva, à la même époque, que la femme du conseiller Walter Lutkens devint enceinte pour la première fois. La vieille sage-femme, Barbara Rolloffin, prédit que la gracieuse dame, aussi belle que bien portante, accoucherait à coup sûr d’un joli petit garçon : cette douce espérance mit le comble à la joie de M. Walter Lutkens.

L’étranger, qui avait figuré à la noce de M. Lutkens, était dans l’habitude de les visiter de temps à autre, et il arriva un jour, qu’étant survenu à l’im-