dans l’emploi de prima donna, sur le grand théâtre de F.... Quoiqu’elle ne fût plus absolument jeune, elle ravissait tout le monde par le charme irrésistible de son rare et merveilleux talent. Sa voix n’avait rien perdu de sa puissance.
Cependant Antonia avait grandi, et sa mère ne pouvait se lasser d’écrire au conseiller qu’Antonia promettait d’être un jour une cantatrice du premier ordre. Ce présage était confirmé d’ailleurs à Krespel par ses amis de F...., qui l’engageaient à venir dans cette ville pour admirer la réunion de deux sublimes cantatrices. Ils ne se doutaient pas quels rapports intimes existaient entre le conseiller et ces deux femmes. Krespel aurait, de bien grand cœur, voulu voir en réalité sa fille qui lui était si chère, et dont l’image lui avait, plus d’une fois, apparu en songe ; mais, dès qu’il pensait à sa femme, il se sentait tout troublé, et il finit par demeurer chez lui au milieu de ses violons démontés.
Vous aurez entendu parler du jeune compositeur B*** de F.... qui donnait de si grandes espérances, et qui nous priva tout à coup de ses productions, on ne sait pourquoi ; peut-être l’avez-vous connu lui-même ? — Eh bien, ce jeune homme devint éperdûment amoureux d’Antonia, et il proposa à sa mère, au cas où il serait payé de retour, d’approuver une union qui serait à la gloire et au profit de l’art. Angela avait donné son assentiment, et pour le conseiller, il consentait d’autant plus volontiers, que les compositions du jeune maître avaient trouvé grâce devant son jugement sévère. Krespel s’atten-