cupée des sons harmonieux qui planaient sur la mer. Quand le chant ne parvint plus à son oreille, elle tint ses regards fixés devant elle d’une manière étrange, comme quelqu’un qui se réveille d’un sommeil profond et qui cherche à comprendre les vagues révélations d’un songe. « Senza amare ! — senza amare ! non può consolare, » répétait-elle tout bas, et des larmes brillaient comme des perles limpides dans ses yeux célestes, et des soupirs s’échappaient de son sein que soulevait une émotion inconnue. Toujours gai et souriant, et poursuivant ses récits, le doge monta suivi de la dogaresse sur la terrasse devant sa maison, voisine de San-Giorgio-Maggiore, et il ne s’aperçut pas qu’Annunziata, comme pénétrée d’un sentiment étrange et mystérieux, était sans voix, le regard humide de pleurs tourné à l’horizon, et se tenant à ses côtés comme sous l’oppression d’un rêve. — Un jeune homme vêtu en marin sonna d’une trompe en forme de coquillage dont le son se prolongea sur la mer. À ce signal on vit s’avancer une autre gondole. En même temps, une femme et un homme portant un parasol, s’étaient approchés pour accompagner le doge et la dogaresse, qui se dirigèrent vers le palais. L’autre gondole aborda, Marino Bodoeri en sortit avec beaucoup de monde, parmi lequel se trouvaient des marchands, des artistes, et même des gens de la dernière classe du peuple ; tous suivirent le doge au palais.
Antonio pouvait à peine attendre la fin du jour suivant, espérant qu’il recevrait de sa chère Annun-