duite devant le tribunal ecclésiastique. Ô mon Tonino ! par quelles affreuses tortures on tenta de m’arracher l’aveu du pacte le plus abominable. — Je restai ferme. Mes cheveux blanchirent, mes pieds et mes mains furent disloqués, mon corps se rabougrit comme une momie. Mais je n’avais pas encore subi la torture la plus atroce, le dernier raffinement de la cruauté la plus infernale : elle m’arracha cet aveu dont le souvenir me fait frissonner encore. — Je devais être brûlée ; bref, lors du tremblement de terre qui ébranla les murailles des palais et celles de la grande prison, les portes de mon cachot s’ouvrirent d’elles-mêmes, et je pris la fuite en chancelant, comme rappelée du fond de la tombe, à travers les ruines et les décombres. Hélas ! Tonino, tu m’as appelé une vieille femme de quatre-vingt-dix ans, et j’ai à peine cinquante ans. Ce corps étique, ce visage horriblement sillonné, ces cheveux blanchis, ces pieds déboîtés ; — non, ce n’est point l’âge, mais ce sont des supplices inouïs qui ont su métamorphoser, en peu de mois, la femme valide en un monstre hideux. — Et ce rire suffocant et intolérable… Cette dernière torture, à l’idée de laquelle je sens mes cheveux se hérisser et mon corps s’embraser comme au contact d’une armure brûlante, c’est elle qui me l’a arraché, et depuis lors il s’empare de moi comme une crampe tenace et irrésistible. N’aie plus horreur de moi, à présent, mon Tonino ! Ah ! ton cœur l’a révélé, j’en suis certaine, qu’enfant tu reposais sur mon sein…
— Femme, femme, dit Antonio d’une voix sonore