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Senigaglia est connu et estimé. » C’est ainsi que la préoccupation de son amour-propre et de cet honneur imprévu, effaçait l’aversion qu’aurait dû lui inspirer autrement une société à la tête de laquelle se trouvait Salvator Rosa. L’habit de cérémonie espagnol fui plus soigneusement brossé que jamais, le chapeau pointu orné d’une plume neuve, les souliers garnis pareillement de bouffettes neuves, et ainsi paré, signor Pasquale, étincelant comme un rubis, apparut radieux au logis de Salvator. La magnificence dont il se vit entouré, Salvator même qui le reçut, vêtu de l’habit le plus riche, lui imposèrent une contenance respectueuse ; et, comme cela est habituel aux âmes étroites qui, d’abord enflées d’arrogance, se courbent et rampent dans la poussière dès qu’elles sentent une supériorité quelconque, Pasquale fut tout humilité et déférence devant ce même Salvator qu’à Rome il se montrait si empressé de faire poursuivre.

On entoura à l’envi signor Pasquale de tant d’attentions, on s’en rapporta tellement sans restriction à son jugement, on porta si loin la flatterie pour ses talents, qu’il se trouva comme inspiré d’une verve extraordinaire, et qu’il tint maints propos beaucoup plus judicieux qu’on ne devait s’y attendre. — Si l’on ajoute à cela que de sa vie il n’avait été traité plus splendidement, qu’il n’avait jamais bu de vin plus exquis, on concevra, sans peine, que son contentement dut augmenter de minute en minute, et qu’il oublia, non-seulement les désagréments