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de chanter et de pincer de la guitare où bon lui semblait était chose inouïe à Rome, et qu’une pareille requête était dénuée de bon sens : alors signor Pasquale résolut de mettre lui-même fin à l’affaire, et promit à Michel une assez bonne somme s’il voulait, à la première occasion, faire irruption sur les peintres, je veux dire les chanteurs, et les rosser d’importance.

Michel fit aussitôt l’emplète d’un solide gourdin et se posta chaque nuit de guet derrière la porte. Mais il arriva simultanément que Salvator et Antonio, pour écarter de l’esprit de Capuzzi toute idée de leurs artifices, jugèrent à propos de supprimer leurs sérénades à la rue Ripetta durant les nuits qui devaient précéder l’exécution de leur projet. Marianna avoua ingénuement qu’autant elle avait de haine pour Antonio et Salvator, autant elle prenait plaisir à entendre leurs concerts, dont les accords dans le silence de la nuit avaient, disait-elle, un charme suprême. Signor Pasquale ne laissa pas tomber à terre ces paroles, et projeta, en vrai chevalier galant, de surprendre sa bien-aimée par une sérénade de sa façon, qu’il répéta avec un soin extrême, assisté de ses deux intimes.

Or, dans la nuit même qui précédait le jour où il espérait voir célébrer au théâtre de Nicolo Musso son plus beau triomphe, il sortit à la dérobée et alla quérir ses compagnons prévenus d’avance ; mais à peine avaient-ils tiré un premier accord de leurs instruments que Michel, à qui signor Pasquale n’avait rien communiqué de son dessein, enchanté de