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préfère ne plus rien dire pour essayer de vous convaincre et passer outre.

À peine le jour avait-il paru, que je courus, plein de désirs et d’inquiétude, dans l’avenue, et je me postai en face de la maison mystérieuse. De hautes jalousies servaient, de plus que la veille, à masquer les croisées. Car la rue était encore complètement déserte. Je m’approchai très-près des fenêtres murées du rez-de-chaussée, et je prêtai une oreille attentive. Mais aucun son ne se fit entendre, tout restait silencieux comme dans le fond d’un tombeau. Le jour arriva, et le mouvement de la rue m’obligea de quitter mon poste.

À quoi bon lasser votre patience en vous disant comme quoi je rôdai pendant plusieurs jours autour de la maison sans découvrir la moindre chose, comme quoi mes informations et mes recherches restèrent sans résultat, et comment enfin la charmante image de ma vision pâlit peu à peu dans mon esprit ?

Enfin, en revenant une fois d’une longue promenade fort avant dans la soirée, j’aperçus la porte de la maison déserte à demi-ouverte. Je m’en approchai. L’homme à l’habit café brûlé avança la tête en-debors. Je pris soudain mon parti.

« Le conseiller privé de finances Binder ne démettre-t-il pas dans cette maison ? » Telle fut la question que j’adressai au vieillard tout en l’écartant de la main pour pénétrer sous le vestibule, qu’une lampe éclairait faiblement. Il jeta en souriant un regard perçant sur moi, et me dit d’une voix doucereuse et traînante : « Non, il ne demeure pas ici, il