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bizarre que j’avais vu, et bientôt je vis surgir vivante devant moi l’image d’une créature toute céleste que je supposais victime de sortilèges infâmes. Le vieillard m’apparut comme un méchant magicien, un damnable suppôt de la sorcellerie qui, devenu sans doute tout-à-fait indépendant de la famille du comte de S***, s’adonnait dans son unique intérêt aux plus odieux maléfices.

Mon imagination s’exalta, et la nuit même je vis, non pas en rêve, mais plutôt dans cet égarement d’idées qui précède le sommeil, je vis distinctement se dessiner à mes yeux la main parée du magnifique diamant et le bras ceint du riche bracelet. Peu à peu, du sein d’un léger nuage gris surgit une tête charmante, dont les yeux bleus d’azur et suppliants respiraient la tristesse ; puis je vis apparaître la figure entière d’une jeune fille merveilleusement belle, dans la fleur de la jeunesse, et pleine d’une grâce ravissante. Bientôt je m’aperçus que le nuage ambiant n’était autre chose que la vapeur subtile qui s’échappait par ondoyantes bouffées du flacon de cristal que la figure portait à la main.

« Ô magique et céleste image ! m’écriai-je dans mon extase, apprends-moi quel est ton sort et qui te retient captive ! — Oh ! que d’amour et de tristesse il y a dans ton regard !… Je le sais, c’est un infâme nécromant qui te traite en esclave. Tu es au pouvoir d’un pernicieux démon, lequel rôde avec un habit café-brûlé et une énorme bourse à cheveux dans les boutiques des confiseurs, où il court risque de tout briser par ses bonds diaboliques, lequel écrase les