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contenancé, car jamais jusque-là je n’avais encore entendu de chien parler aussi distinctement.

Je me remis pourtant, et je me crus dans l’obligation de secourir de tout mon pouvoir le pauvre animal, à qui l’approche de la mort déliait la langue sans doute pour la première fois, à l’ombre de la statue miraculeuse de saint Népomucène. J’allai donc chercher à la rivière, dans mon chapeau, de l’eau dont je l’aspergeai, ce qui lui fit ouvrir de grands yeux flamboyants, et montrer en grognant deux rangées de dents qui auraient pu faire honneur au ténor le plus difficile. Cela ne me rassura pas précisément ; mais, pensai-je en moi-même, avec un chien raisonnable qui parle, et qui par conséquent doit comprendre également ce qu’on lui dit, je me tirerai toujours bien d’affaire en y mettant de la civilité.

« Monsieur ! lui dis-je le premier, vous éprouvâtes tout-à-l’heure une légère indisposition, vous étiez bien près de passer un méchant quart-d’heure, et peut-être alliez-vous, comme dit le proverbe, crever comme un chien, vous même qui semblez prendre plaisir à vouloir vous faire passer pour tel. Sur ma parole ! si vos yeux projettent encore de si vifs éclairs, si vous avez encore la force de grogner, je veux dire de murmurer un peu, vous le devez à l’eau fraîche que je suis allé puiser au fleuve voisin, dans mon chapeau tout neuf, au risque imminent de mouiller mes bottes ! »

Le chien se redressa avec peine, et après s’être couché commodément sur le flanc, les pattes de