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le texte d’uoe histoire tellement surprenante, que l’imagination la plus poétique et la plus indépendante pouvait seule en admettre la réalité dans la vie commune. Je devrais sans doute ici vous faire part de l’histoire du comte que j’ai encore présente à l’esprit dans toute sa vivacité ; mais je me sens dès à présent si fortement préoccupé de ma propre aventure qu’il me faut poursuivre mon récit.

Seulement, imaginez quel fut le désappointement du comte, lorsqu’après avoir parfait et complété son histoire, il apprit que la maison déserte servait tout bonnement de laboratoire au confiseur dont la boutique, magnifiquement décorée, était contiguë. C’est pour cela que les fenêtres du rez-de-chaussée, où étaient établis les fourneaux, avaient été murées, et que celles des chambres du premier étage étaient garnies d’épais rideaux pour garantir du soleil et des insectes les sucreries fabriquées qu’on y gardait en réserve.

À cette communication inattendue, j’éprouvai, comme cela était arrivé au comte lui-même, l’effet d’une douche froide qui aurait jailli sur ma tête, c’est-à-dire que le diable, auquel répugne toüte poésie, d’un coup de sa griffe aiguë, nous gratifia, pauvres rêveurs ! du plus honteux pied de nez.

Toutefois, en dépit de cette prosaïque explication, je ne pouvais m’empêcher de regarder toujours en passant la maison déserte, et toujours à cette vue un léger frisson parcourait mes membres, et mille visions bizarres de ce qui pouvait se passer à l’intérieur surgissaient dans mon esprit. Je ne pouvais