Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 4, trad. Egmont, 1836.djvu/16

Cette page n’a pas encore été corrigée
4

compagnons de ma jeunesse, comment j’ai toujours eu des manies de visionnaire, et quel vif penchant m’entraîne à ne m’occuper que des merveilleux phénomènes du monde fantastique, ce que vous ne cessiez de désapprouver au nom d’une raison sévère. — Eh hien ! prenez à votre aise vos airs sceptiques et railleurs ; j’avouerai même volontiers que j’ai sou~ vent été la franche dupe de mes propres illusions, et que la maison déserte semblait fort devoir me réserver une déception du même genre ; mais patience jusqu’à la fin, dont la morale doit vous confondre ! Écoutez.

Un jour donc, et cela à l’heure oû le bon ton convoque les promeneurs dans l’avenue, j’étais, comme à l’ordinaire, plongé dans de profondes réflexions en contemplant la maison déserte. Bientôt je remarquai, sans y attacher une grande importance, que quelqu’un venait de s’arrêter prés de moi en me considérant. C’était le comte P***, dont le caractère analogue au mien s’était déjà manifesté en maintes circonstances, et je ne doutai pas un seul instant que l’aspect mystérieux de la maison ne l’eût frappé ainsi que moi. Jugez de mon émotion, lorsqu’après avoir parlé le premier de la singulière impression que m’avait causée la vue de ce bâtiment abandonné au centre du quartier le plus à la mode de la capitale, je le vis sourire avec affectation. Mais j’en sus bientôt le motif.

Le comte P*** était allé beaucoup plus loin que moi dans ses observations et ses suppositions. Enfin il s’était rendu conipte du secret, et il sut en faire