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Contes

du miroir une figure vague et flottante s’avancer vers moi. En la considérant avec plus d’attention, je distinguai de plus en plus nettement les traits d’une femme charmante, rayonnant de je ne sais quelle lueur magique. C’était l’image de Julie.

Dans le transport de mes désirs brûlants, je m’écriai tout haut : « Julie !… Julie ! » Soudain j’entends soupirer et gémir derrière les rideaux d’un lit, dans l’enfoncement de la chambre. Je prête l’oreille, les gémissements deviennent de plus en plus plaintifs. L’ombre de Julie avait disparu. Je saisis résolument un flambeau, je m’approchai du lit et je tirai violemment les rideaux. Mais comment te décrire la stupéfaction qui s’empara de moi, lorsque je reconnus le petit homme du caveau, qui dormait, avec son visage juvénil, mais douloureusement contracté, et qui s’écriait avec de profonds et amers soupirs : « Giulietta ! – Giulietta ! » – Ce nom me causa un frisson glacial !…

Remis de mon effroi, je saisis le petit, et, le secouant rudement, je m’écriai : « Hé ! – cher ami, comment vous trouvez-vous dans ma chambre ? réveillez-vous ! et ayez la bonté de vous en aller au diable ! » – Le petit ouvrit les yeux, et fixa sur moi des regards sombres : « Ah ! fit-il, c’était un mauvais rêve : je vous rends grâce, monsieur, de m’avoir éveillé. » Ces mots résonnèrent faiblement comme de légers soupirs. Je ne sais comment cela se fit, mais le petit me parut alors tout autre qu’auparavant ; bien plus, la douleur dont il semblait affecté pénétra dans mon propre cœur, et toute ma