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avec la souveraine absolue de mon âme. Mais j’étais animé d’un sombre ressentiment contre le baron, en qui je ne voyais plus qu’un despote brutal d’après la contenance servile et craintive à laquelle, malgré ses cheveux blancs, s’était abaisse devant lui le vieux domestique. « As-tu donc cessé de voir et d’entendre ? » me dit à la fin mon grand-oncle en me frappant sur l’épaule, et nous rentrâmes tous les deux dans notre appartement. Alors il me dit : « Cousin, ne sois pas si assidu près de la baronne. À quoi bon ? laisse cela aux jeunes fats dont la galanterie est le métier, il n’en manque pas pour lui faire la cour. » — J’expliquai comment les choses s’étaient passées, et je priai mon grand-oncle de me dire si je méritais le plus petit reproche. « Hum !… hum ! » fit-il, ce fut sa seule réponse ; puis, ayant mis sa robe de chambre et allumé sa pipe, il se jeta dans un fauteuil, et causa de la chasse de la veille, en me raillant sur ma maladresse.

Le château était rentré dans le silence. Les dames et les cavaliers s’occupaient, chacun dans sa chambre, de préparer leur toilette de soirée ; car les musiciens de passage dont nous avait parlé mademoiselle Adelheid, avec leurs violons enroués, leurs basses discordantes et leurs hautbois larmoyants, étaient arrivés, et il ne s’agissait de rien moins pour la nuit que d’un bal dans toutes les formes. Mon grand-oncle, préférant à ce tumulte fou un sommeil tranquille, ne se dérangea pas. Moi, au contraire, je venais de m’habiller au grand complet, lorsqu’on frappa tout doucement à notre porte, et Franz