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— En cette occurrence, lecteur bénévole, si toutefois tu sais habilement manier un crayon, tu n’auras pu certainement résister à l’envie de faire le croquis de ce magnifique bourguemestre suivi d’un si joli page. Il y avait toujours autrefois sur des tables à l’entour de la salle ce qu’il fallait pour écrire, et ce matériel, entretenu aux frais de la ville, devait redoubler ta tentation. Mais si tu étais bien le maître de la satisfaire, bienveillant lecteur, il n’en était pas de même du jeune Traugott, à qui une fantaisie semblable valut mille désagréments et mille infortunes.

« Veuillez, mon cher monsieur Traugott, aviser sur-le-champ notre ami de Hambourg de la conclusion de cette affaire, » disait messire Elias Roos, négociant distingué de qui Traugott devait bientôt devenir l’associé et le gendre, en épousant sa fille Christine. Le jeune homme trouva avec peine une petite place au bout d’une table, il prit une feuille de papier, trempa sa plume dans l’écritoire, et il allait commencer par une hardie majuscule, lorsque, voulant repasser sommairement en esprit l’objet de sa missive, il leva les yeux en l’air.

Le hasard voulut que son regard tombât précisément sur ces deux figures peintes du cortège dont l’aspect le remplissait toujours d’une profonde et inconcevable tristesse. Un homme à l’air grave, presque sombre, avec une barbe noire en désordre, et magnifiquement vêtu, s’avançait sur un cheval dont les rênes étaient tenues par un séduisant jeune homme qu’à sa chevelure tressée en boucles abon-