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val ! — Quant à toi, tu n’es décidément bon à rien aujourd’hui. Porte-toi bien ! » Fabian courut à toutes jambes à travers le bois vers la ville.

Balthasar quitta le chemin battu et s’enfonça dans le plus épais du fourré. Là il se laissa tomber sur un banc de mousse, et s’abandonna aux amères sensations qui l’oppressaient. Peut-être bien aimait-il véritablement la charmante Candida, mais cet amour, il l’avait enfoui, dérobé comme un secret intime et précieux dans le plus profond de son cœur aux yeux de tous les hommes et aux siens propres. Et lorsque Fabian en avait parlé d’un ton si leste, avec aussi peu de ménagement, il lui avait semblé voir arracher par des mains grossières et insolemment audacieuses le voile d’une image de sainte, auquel lui-même n’aurait pas osé porter la main, dans la crainte de s’attirer une éternelle réprobation. Oui les paroles de Fabian résonnaient à son oreille comme une abominable dérision de ses sentiments les plus chers et de ses rêves les plus doux.

« Ainsi, s’écria-t-il emporté par sa mauvaise humeur, tu vois en moi, Fabian, un fat amoureux qui court aux leçons de MoschTerpin pour respirer, au moins durant une heure, sous le même toit que la belle Candida, un niais qui rôde solitairement dans les bois pour ruminer de pitoyables vers à la bien-aimée, et lui en adresser le message plus pitoyable encore, un enfant qui dégrade les arbres en découpant sur leur verte écorce des chiffres entrelacés, un pauvre diable incapable, en présence de sa belle, de prononcer deux paroles de suite, qui ne fait