vécut malheureuse au milieu de l’opulence. Un jour, à Gênes, où je tenais alors ma banque, il arriva qu’un jeune Romain vint risquer à mon jeu tout son riche héritage. Comme je l’ai fait aujourd’hui, il me supplia de lui prêter au moins quelque argent pour retourner à Rome. Je le refusai en riant avec mépris, et lui, dans sa fureur, il me plongea son stylet dans le sein. Ce fut difficilement que les médecins parvinrent à sauver mes jours, et ma convalescence fut longue et douloureuse. Ma femme m’entoura de soins ; elle me consola, elle me soutint contre mes maux, et je sentis renaître en moi avec la santé un sentiment que je croyais éteint à jamais, ou plutôt j’éprouvai une passion qui m’était inconnue, car tous les sentimens humains sont éteints pour le joueur. J’ignorais encore ce que c’est que l’amour et le fidèle dévouement d’une
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