Page:Hoffmann - Œuvres complètes, t. 3, trad. Loève-Veimars, 1832.djvu/153

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui était prêt à le percer de son dard ? — Tonino, il eût fallu voir de quelle rougeur subite se couvrirent ses joues pâles, et de quel feu brillèrent ses yeux éteints. — Ah ! bonne vieille, dit-elle, je ne l’ai pas oublié. Je n’étais alors qu’un enfant. C’était à la maison de plaisance de mon père, c’était un bel enfant ; il me semble que je le vois encore. — Alors je lui parlai de toi, je lui dis que tu étais à Venise, que tu portais encore dans ton âme le souvenir de cet heureux moment ; que, pour la contempler, pour voir un seul instant l’ange qui l’avait sauvé, tu avais risqué ta vie, et que c’était toi qui lui avais présenté le bouquet du giovedo-grasso. — Ah ! dit-elle, je l’ai senti, je l’ai deviné, lorsqu’il déposa sur ma main un baiser brûlant, il me sembla qu’un souvenir de bonheur se réveillait en moi.