Alexis mérite à beaucoup d'égards les reproches dont l'ont accablé les historiens latins, quoique les attaques des Turcomans aient pu l'empêcher de seconder utilement ses sauveurs. Il employa le reste de sa vie agitée à consolider ses conquêtes et à pacifier ses États, troublés par des hérésies. Il réprima entre autres très-sévèrement les manichéens ; mais le clergé ne lui en voulut pas moins d'avoir dépouillé les églises peut-être plus que ne l'exigeaient les circonstances, il mourut âgé de soixante-dix ans, après un règne de trente-sept ans quatre mois et demi. La longueur de ce règne explique comment les Grecs, habitués au changement, ne lui surent pas gré de tout ce qu'il avait fait pour eux. Il avait agrandi l'empire ; et pour le défendre il laissait à ses successeurs une armée bien disciplinée, ce qui n'avait pas existé avant lui. On comprend les éloges que sa fille Anna lui prodigue dans son Alexiade ; mais sa femme n'avait pas la même opinion de lui. On raconte que, le priant sur son lit de mort de désigner son successeur, elle reçut pour toute réponse des paroles vagues sur la vanité du monde ; à quoi elle aurait répliqué : « Vous mourrez comme Vous avez vécu, en hypocrite. »
Anna Comnène, Alexias. — Glycas, P. IV, in fin., pag. 616, etc., cd. Bonn. — Guillaume de Tyr, t. II, c. 5, 23. — Strada, Thesaurus antlquitatum, seu vitiæ imperatorum occidentalium et orientalium, in vita Alexii. — Gibbon, Decline and fall of the Roman Empire, chap. 48, 56, 58, 59. — Wilken, Geschichte der Kreuzzilge — Mill, History of the Crusades. — Michaud, Histoire des Croisades, et Bibliothèque des Croisades. — Zonare. — Baronius. — Friedrich Wilken, Commentatio rerum ab Alexio l, etc.; Heidelb., 1812, 4.
ALEXIS OU ALEXIUS II COMNÈNE (Άλεξιζ ou Άλέξιοζ Κομνηνόζ), empereur de Constantinople, né le 10 septembre 1167, mort en 1183. Fils de Manuel, il parvint à l'empire le 24 septembre 1180, sous la tutelle de sa mère Marie. Cette princesse accorda la régence au sébastocrator Alexis , neveu de Manuel. Ce choix ne fut pas heureux. L'abus que le sébastocrator fit de son autorité souleva la plupart des grands contre lui : ils appelèrent à leur secours Andronic, cousin du défunt empereur, qui l'avait envoyé en exil. Andronic s'étant rendu maître de Constantinople au mois d'avril 1182, fit
Nicétas, Alexius Manuelis Comn. fil., 18. — Du Cange, Familiæ Byzantinæ, p. 188. — Gibbon, Decline and Fall, c. 48. — Le Beau, Histoire du Bas-Empire. — Strada, Thesaurus antiquitatum, seu vitæ imperatorum. — Guillaume de Tyr ; Anna Comnène, Alexiados libri XX rerum ab Alexio patre imperatore gestarum, publ. par Pierre Possin ; Paris, 1651, in-fol.
ALEXIS ou ALEXIUS III L'ANGE (Άλεξιζ ου Άλέξιοζ Άγγελοζ), empereur de Constantinople , mort en 1210. Il était le petit-fils de Théodore Comnène, fille d'Alexis Ier. Pendant le règne du tyran Andronic il s'était réfugié auprès de Saladin ; il revint dans sa patrie lorsque Isaac son frère eut détrôné Andronic et se fut emparé de la couronne. Comblé d'honneurs par le nouvel empereur, il n'en complota pas moins contre lui ; il le fit aveugler, et fut, en 1195, nommé empereur à sa place. Dédaignant alors le nom de son père, il prit celui de Comnène, nom de son aïeule. Son règne fut honteux à l'extérieur par la faiblesse de ses armes, et indigne à l'intérieur par les déprédations qu'il laissait faire sur ses sujets par sa femme Euphrosine. Il dut sa perte à l'activité de son neveu, fils d'Isaac, qui était parvenu à s'échapper de ses mains. Celui-ci excita son beau-frère Philippe de Souabe, et l'empereur d'Allemagne Henri VI, à déclarer la guerre à Alexis ; une forte somme d'argent fut promise à Henri par Alexis, pour l'apaiser : il spolia les églises leva d'énormes impôts sur ses sujets ; et la somme étant réunie, il la garda pour lui-même et se moqua de l'empereur, dont le ressentiment lui aurait été fatal, si la mort de celui-ci n'eût interrompu la guerre déjà commencée. Quelques années après, le jeune prince Alexis implora les princes chrétiens réunis à Venise pour une nouvelle croisade, en leur promettant des subsides considérables et la cessation du schisme grec.
Sous le commandement de Dandolo, doge de Venise (Voy. Dandolo), une flotte formidable vint, en 1203, anéantir les moyens de défense du brave Théodore Lascaris, gendre de l'empereur. Celui-ci se sauva, sans attendre le résultat, avec des trésors immenses auprès de son beau-frère