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[1]livre de Guillaume de Saint-Amour, Des Périls des temps derniers, contre les religieux mendiants ; mais il proscrivit en même temps le livre de l'Évangile éternel, attribué à Jean de Parme, général des mineurs. Vers le même temps il réunit en un seul corps cinq congrégations d’ermites, deux de Saint-Guillaume et trois de Saint-Augustin. Ce fut sous le pontificat d’Alexandre IV, en 1259, que parut en Italie la secte des flagellants, qui, pour expier les vices et les désordres de leurs contemporains, se fustigeaient jusqu’au sang, et donnaient eux-mêmes en public le spectacle d’une pénitence non moins scandaleuse que cruelle. Alexandre IV travaillait, comme ses prédécesseurs, à réunir l’Église grecque avec l’Église latine, lorsqu’il mourut. Il eut pour successeur Urbain IV.

Plusieurs lettres et bulles de ce pape ont été imprimées dans Labbe, Concilia ; dans Ughelli, Italia sacra ; dans d’Achery, Specilegium, et dans d’autres recueils.

Onuphre et Génébrad, in Chron. — Duchêne, Histoire des papes. — Du Boulay, Histoire de l’université de Paris, III. — Muratori, Annali d’Italia. — Giannone, Storia civile del regno di Napoli. — Panvinio, Vite dei Pontifici.

ALEXANDRE V, pape, mort le 3 mai 1410, fut cardinal sous le nom de Pierre Filargo, et passait pour originaire de l’île de Candie. Encore fort jeune, il entra dans l’ordre des Franciscains. Ses supérieurs l’envoyèrent en 1357 à l’université de Padoue, pour qu’il y fit ses études. De Padoue il vint à Paris, où il prit ses grades, et visita aussi l’université d’Oxford. Il composa, à Paris, un livre sur les Sentences de maître Lombard. De retour en Italie, il fit l’éducation du fils de Galéas Visconti, qui plus tard obtint pour lui l’évêché de Vienne, puis celui de Navarre, enfin l’archevêché de Milan en 1402. Deux ans après, il fut nommé cardinal par Innocent VII ; et le 26 juin 1409, à l’âge de soixante-dix ans, il fut élu pape par les cardinaux réunis en concile à Pise, et après la déposition de deux papes rivaux, Grégoire XII et Benoît XII. Son premier acte fut de confirmer les décrets du concile de Pise. Son gouvernement fut extrêmement faible : il n’agissait que par les conseils du cardinal Balthasar Cossa, qui lui succéda sous le nom de Jean XXIII. Alexandre avait fixé sa résidence à Bologne, et il avait coutume de dire « qu’il ne pouvait être tenté, comme ses prédécesseurs, d’agrandir ses parents, puisqu’il n’avait jamais connu ni père, ni mère, ni frère, ni sœur, ni neveu. » — Il passait pour un des hommes les plus érudits de son temps ; il traduisit du grec en latin plusieurs ouvrages qui n’ont pas vu le jour. Mazzuchelli (Scrittori d’Italia) donne la liste des écrits de ce pape ; mais il n’y a d’imprimé que ses bulles et ses

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lettres pontificales, ainsi qu’un petit Traité sur la conception de la sainte Vierge.

Tiraboschi, Storia della letteratura italiana, vol. 6. — Muratori, Annali d’Italia. — Maimbourg, Histoire du grand schisme.

ALEXANDRE VI, pape, né à Valence en Espagne l’an 1431, mort le 18 août 1503 (1) [2]. Il était fils de Godefroi Lenzolio ou Lenzuolo (suivant les médailles du pape Alexandre VI), officier espagnol, et de Jeanne Borgia (2) [3], sœur du pape Calixte III, et s’appelait Rodriguez ou Roderic, nom auquel il ajoutait encore celui de Borgia. Il étudia d’abord le droit, et se distingua comme avocat ; puis il suivit la carrière militaire, pour laquelle il se sentait plus de vocation. Ce fut alors qu’il devint amoureux d’une certaine veuve qui avait deux filles, fort jeunes et belles. Après la mort de la mère, il les prit toutes deux sous sa tutelle : il mit l’une dans un couvent, et garda l’autre auprès de lui ; c’était la fameuse Rosa Vanozza, dont il eut cinq enfants (quatre fils et une fille) : l'Habbe, dit Tomasi, in luogo più di légitima moglie che di sacrilega concubina (3) [4]. Il aimait beaucoup sa femme, et était un père tendre pour ses enfants : l’aîné s’appelait François, duc de Candie ; le second, César, devenu si fameux sous le nom de duc de Valentinois ; le troisième, Giufre, prince de Squillace : le quatrième enfant fut la fameuse Lucrèce, mariée quatre fois ; le nom du cinquième est resté ignoré. Il leur donna une aussi bonne éducation que s’ils avaient été ses enfants légitimes, et leur assura à chacun une assez grande portion de son bien pour les faire vivre à leur aise ; ce qu’il fit avec la dernière précaution, ne voulant pas qu’on sût ses intrigues ; et, en effet, il les tint si secrètes, qu’elles ne furent rendues publiques que lorsqu’il parvint à la papauté (4) [5].

Pendant qu’il vivait ainsi heureux et tranquille, Roderic reçut la nouvelle que son oncle avait été élu pape (le 8 avril 1455), sous le nom de Calixte III. Cette circonstance lui devint fatale, en changeant tout le plan de sa vie. Il écrivit à son oncle une lettre de félicitation respectueuse, priant Sa Sainteté de lui continuer sa protection. Le pape appela son neveu à Rome, et lui offrit d’abord un bénéfice de douze mille

  1. deux chaires de théologie ; l’université ne voulait leur en accorder qu’une, tandis que le pape leur en accordait un nombre indéfini, les droits des dominicains étaient alors défendus, à la cour du pape, par Albert le Grand.
  2. (1) Pour prévenir tout reproche de partialité, nous ne suivrons, dans l’histoire de ce fameux personnage, que les autorités les plus généralement admises, Tomaso Tomasi, Platina, Burchard, le cardinal Rembo, etc. Nous prendrons pour guide principal l’ouvrage de Gordon, jugé impartial par l’abbé Feller lui-même ; et nous nous défierons de Guicchardin, auquel Voltaire lui-même reproche trop de passion. Enfin, nous ne laisserons parler que l’histoire.
  3. (2) La maison de Borgia était très-ancienne en Espagne ; elle descendait, dit-on, des anciens rois d’Aragon. Caliste III, auparavant nomme Alfonse Borgia, mort en 1438, eut quatre sœurs : l’aînée, Catherine, mariée avec Jean del Milla, fut mère de Louis-Jean del Milla, cardinal, mort en 1507. Une autre des sœurs, Jeanne ou Isabelle, épousa Godefroi Lenzolio, et fut mère du pape Alexandre VI et de trois filles mariées en Espagne.
  4. (3) Tom. Tomasi, Vita duc. Valentin., p. 3, édit. 1670.
  5. (4) Al. Gordon, Vie du pape Alexandre VI, 1. 1, p. 7.