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l’Église, de tous éclairer par de fréquentes instructions ; mais la longueur du chemin nous empêchant de le faire par nous-mêmes, nous en avons donné la commission à l’archevêque de Brème, notre légat. Soyez donc assuré qu’en suivant sa voix, c’est au saint-siége même que vous rendrez obéissance. » Parmi les autres Épitres de ce pape, on remarque celle qu’il adressa aux évêques de France, à l’occasion de la persécution des juifs. Plusieurs chrétiens, indignes de ce nom, avaient alors l’étrange dévotion de massacrer ces malheureux, s’imaginant gagner la vie éternelle par ces meurtres. Alexandre loue beaucoup les évêques de France de ne s’être pas prêtés à ces cruautés. Ce pape mourut après avoir porté la tiare pendant onze ans et demi ; il fut enterré dans la basilique du Latran. C’était un homme de mœurs irréprochables, et d’un zèle éclairé pour la réforme disciplinaire du clergé, ainsi que pour la défense des droits du saint-siége. Il eut pour successeur son principal conseiller, le fameux cardinal Hildebrand, qui prit le nom de Grégoire VII. On trouve les Épitres et les bulles du pape Alexandre II dans les collections des Conciles et des Decretalia.

Platina e Panvinio, Vite dei Pontifici. — Verri, Storia di Milano. — Baronius, Annal.

ALEXANDRE III, mort le 3 août 1181. Ce pape se nommait, avant son élection, Roland Rainuce, natif de Sienne, de la maison des Bandinelli. Il professa d’abord la théologie à l’université de Bologne, et fut créé cardinal du titre de Saint-Marc par Eugène III, et chancelier de l’Église romaine par Adrien IV. Il fut élu pape le 7 septembre 1159 par tous les cardinaux réunis, à l’exception de trois : Jean Morson, cardinal de Saint-Martin, Gui de Crème, cardinal de Saint-Calixte, et Octavien, cardinal de Sainte-Cécile : les deux premiers donnèrent leur voix au cardinal Octavien, parent des comtes de Frascati. C’est ce qu’attestent l’auteur de la Chronique de Reichersberg, et l’anonyme du mont Cassin. Onuphre Panvini compte néanmoins six électeurs d’Octavien, lui-même compris, outre ceux qu’on vient de nommer ; Ciaconius et Palatio y en ajoutent encore deux : Grégoire, cardinal-diacre de Saint-Vit, et Guillaume, archidiacre de Pavie. Quoi qu’il en soit, Octavien prit le nom de Victor IV, et, se proclamant pape légitime, arracha la chape des épaules de son rival, et voulut l’emporter. Mais im des cardinaux présents la lui ayant ôtée des mains, il fit signe qu’on lui donnât celle qu’il avait fait apporter, et s’en revêtit avec tant de précipitation, qu’il la mit à l’envers ; ce qui excita de grands éclats de rire, et le fit surnommer pape à l’envers. Des gens armés qu’il avait apostés entrèrent aussitôt dans l’église, et en chassèrent Alexandre et ses adhérents. Il alla ensuite avec sa troupe assiéger Alexandre dans le fort de Saint-Pierre, où celui-ci s’était retiré. Dégagé par le peuple, Alexandre se retira à Santa-Ninfa, dans la Cam-

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panie, où il fut sacré le 20 septembre par l’évêque d’Ostie. Octavien le fut quinze jours après (le 4 octobre), au monastère de Farfe, par l’évêque de Tusculum.

Ce schisme éclata au moment où l’Empire était en hostilité ouverte avec le saint-siége. L’empereur Frédéric Ier prit fait et cause pour le cardinal Octavien, qu’il avait connu légat en Allemagne : il convoqua un concile à Parme, qui proclama Victor IV au mois de février 1160. Ce prince avait des raisons personnelles pour haïr Alexandre, qui était l’un des deux légats qui lui apportèrent à Besançon la lettre d’Adrien IV au sujet de la suprématie papale, et avait appuyé ce qu’elle présentait d’offensant pour l’empereur. Les rois de France et d’Angleterre balancèrent d’abord entre les deux élus ; mais ils se déclarèrent ensuite pour Alexandre III : ceux d’Espagne, de Sicile, de Jérusalem et de Hongrie, suivirent leur exemple. Victor IV, qui se disait élu par le clergé, le sénat et les barons de Rome, était reconnu par l’Allemagne et la Lombardie. Les deux papes s’excommunièrent réciproquement. Alexandre se retira d’abord à Anagni ; et, pour se soustraie au pouvoir de l’empereur, il s’embarqua en 1161 à Terracina, pour Gênes. De là il passa en France ; il arriva le 11 avril 1162 à Maguelonne, et réunit à Tours un concile qui déclara nulles et sacrilèges toutes les ordinations faites par l’antipape. Ce même concile condamna les Albigeois comme hérétiques. En 1163, il célébra la fête de Pâques à Paris, et y posa la première pierre de l’église Notre-Dame. De là il se rendit à Sens le 30 septembre suivant ; il y séjourna pendant un an et demi : ce fut là qu’il vit Thomas Becket, archevêque de Cantorbéry, que sa querelle avec le roi Henri II avait forcé à quitter l’Angleterre. Le pape lui recommanda de continuer la même fermeté à défendre les droits de l’Église. Il y apprit aussi la mort de Victor IV, arrivée à Lucques le 20 ou 22 avril de l’an 1164. Cet événement ne rendit pas la paix à l’Église. Frédéric Ier fit élire le même jour Gui de Crème, qui prit le nom de Pascal III, et fixa sa résidence à Viterbe. En 1165, les affaires de l’Italie donnèrent l’avantage au pape Alexandre ; car l’empereur, après avoir détiuit Milan, avait à combattre une nouvelle insurrection des cités lombardes. Le cardinal Giovanni détermina le sénat et le peuple de Rome à jurer fidélité à Alexandre, et se mit en possession du Vatican.

À cette nouvelle, Alexandre s’embarqua à Montpellier vers la fin d’août 1105. Il arriva d’abord à Messine, où il fut bien accueilli par les officiers du roi Guillaume Ier, roi de Sicile ; de Messine, il se rendit à Salerne, et de là à Ostie. Son entrée à Rome par la porte du Latran fut célébrée commie un triomphe : le sénat, le clergé, le peuple avec des branches d’olivier à la main, les milices portant les bannières déployées, formèrent un cortège brillant. Peu de temps après,