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à Baia, où, renonçant à tout régime, il obtint enfin de la débauche cette mort tant désirée. Quelques moments avant d’expirer, et voulant quitter ce monde en philosophe, il composa les vers ainsi traduits par Fontenelle :

Ma petite âme, ma mignonne,
Tu t’en vas donc, ma fille ? et Dieu sache où tu vas !
Tu pars seulette et tremblottante. Hélas !
Que deviendra ton humeur folichonne ?
Que deviendront tant de jolis ébats (<ref>(1) <poem>Animula vagula, blandula,
Hospes comesque corporis.
Quæ nunc abibis in loca
Pallidula, rigida, nudula,
Nec ut soles, dabis jocos.

(Spart., Vita Adr., c. xxiii).</ref>) ?</poem>

Ce fut le 6 des ides de juillet de l’an de Rome 891 (10 juillet 138 de J.-C.) que mourut Adrien, à l’âge de soixante-deux ans ; et peu s’en fallut que ce prince qui avait introduit un dieu dans l’Olympe n’en fût rejeté lui-même. Antonin eut beaucoup de peine à lui faire décréter par le sénat les honneurs de l’apothéose, qu’avaient obtenus Caligula, Néron, Domitien. C’était trop de rigueur : le règne d’Adrien, malgré les cruautés qui signalèrent son avènement et les derniers temps de sa vie, fut pour l’empire une grande époque. L’art romain y atteignit l’apogée de sa gloire : statues, bas-reliefs, monnaies, mosaïques, portent l’empreinte d’un goût pur, d’un archaïsme sans excès, qui ramenait la sculpture et le dessin aux beaux temps de la Grèce. La littérature fut moins heureuse : le génie avait disparu, et le talent, qui ne le remplace pas, dégénérait chaque jour. Cependant les langues grecque et latine étaient cultivées avec soin. Des grammairiens, ne pouvant mieux faire, composaient des lexiques, dressaient l’inventaire des richesses du passé, et les défendaient de leur mieux contre l’invasion imminente du néologisme. La philosophie, dignement représentée par Favoria, Héliodore, Denys de Milet, Polémon, Secondus, Hérode Atticus, et peut-être même Épictète (2)[1], avait inscrit dans sa morale des maximes qui annonçaient déjà le prochain avènement du christianisme. Les devoirs d’homme à homme, l’amour du prochain, la nécessité de répondre au mal par le bien, y étaient énoncés avec une énergie toute nouvelle. Nous avons vu la réaction de cette morale sur les principes du droit, et dans l’application de ces principes nous trouvons peut-être la véritable cause de la rancune qui fermait à Adrien les portes du Panthéon romain. En proclamant l’égalité du droit civil, en admettant les provinces aux bienfaits d’une législation uniforme, en nivelant les prétentions de l’aristocratie sous les idées stoïciennes, Adrien s’était attiré la haine qui le poursuivait au delà du tombeau. Quoi qu’il en soit, Antonin triompha de la résistance des sénateurs : son père adoptif reçut le titre de Divus, et ses


restes brûlés à Pouzzoles, dans la villa de Cicéron, furent déposés à Rome sous les voûtes immenses qui portent encore le nom de môle d’Adrien. Noël des Vergers.

Dion Cassius. — Spartien. — Dodwell, Praelectiones Acad. ad initium Vitae Adriani a Spartiano scriptae. — Tillemont, vol. II. — Eckhel, D. N. V., t. VI. — Dosithée, Hadriani imp. responsa et rescript, ap. Fabr. Bibl. Graec, t. XII. — Guilhem de Sainte-Croix, Dissertation sur le goût de l’empereur Hadrien pour la philosophie, la jurisprudence, la littérature et les arts (Mém. de l’Acad. des Inscr., t. XLIX). — Greppo, Mémoire sur les voyages d’Adrien et sur les médailles qui s’y rapportent.

ADRIEN, sophiste, né à Tyr vers le milieu du deuxième siècle, étudia l’éloquence à Athènes sous la direction du célèbre Hérodes, qu’il remplaça plus tard. Marc-Aurèle, qui l’avait entendu à Athènes, l’emmena à Rome. Adrien y mourut sous le règne de l’empereur Commode, dont il avait été secrétaire. Il nous reste de lui quelques fragments de discours, publiés en grec et en latin par Léon Allatius dans Excerpta varia grœcorum sophistarum ac rhetorum ; Rome., 1641, in-8o. On les trouve aussi à la suite de Philon de Byzance, de J.-C. Orelli. Schœll, Histoire de la littérature grecque.

ADRIEN (Άδριανόζ), écrivain grec du cinquième siècle de l’ère chrétienne. Suivant Fabricius (Bibl. Graeca, t. Vi, 381), c’est le moine grec auquel saint Nil a adressé une de ses lettres (Léon Allatius, Sancti Nili epistolœ, XI, 60). On a de lui : une introduction à l’Écriture sainte (είσαγωγή εἳζ τάζ θείαζ γράφαζ), ouvrage imprimé pour la première fois en grec par Dan. Hœschel, sur un manuscrit trouvé à Augsbourg, 1602, in-4o ; réimprimé par Jean Pearson dans le t. IX des Critici sacri, Lond., 1660 ; trad. lat. dans les Opuscula de Louis Lollino ; Bellune, 1650.

Cave, Historia literaria. — Jöcher, Allgem. Gelerten-Lexicon.

ADRIEN (Papes du nom d’)

ADRIEN Ier, 94e pape, succéda en 772 à Etienne III, et mourut le 25 décembre 795. Il appela Charlemagne au secours des Romains contre Didier, roi des Lombards. Le roi des Francs marcha sur l’Italie ; et pendant que ses soldats tenaient Pavie assiégée, il se dirigea vers Rome, où il confirma les donations que Pépin avait faites à l’Église romaine, et y ajouta de nouvelles concessions, se réservant toutefois la propriété des pays concédés, et n’en laissant au saint-siége que le domaine utile. Adrien en fit un bon usage, employant ses revenus au soulagement du peuple. Pour témoigner sa reconnaissance à Charlemagne, il le créa patrice de Rome. Ce pontife écrivit contre les erreurs de Félix d’Urgel, et présida par ses légats au deuxième concile général de Nicée. Il répondit par une lettre pleine de modération aux livres Carolins. De son temps et par ses soins, le chant et le rit grégoriens furent introduits d’abord à Metz, puis successivement dans les autres États de l’Empire. Il mourut avec la réputa-

  1. (2) Spartien seul parle des relations d’Épictète avec Adrien. M. Dacier doute qu’Épictète ait vécu jusqu’au règne de ce prince. Esclave d’Epaphrodite, affranchi de Néron, il devait être du moins fort âgé quand Adrien monta sur le trône.