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qu’il advînt ! Car il ne se sentait plus la force physique nécessaire pour leur résister. Tout ce qu’il pourrait faire, à la dernière extrémité, c’était de les massacrer tous, mais alors comment porterait-il tout seul le corps jusqu’au navire ?

En attendant, cette dernière extrémité approchait avec une effrayante rapidité. À une cinquantaine de mètres à peine, le ressac mugissait, de plus en plus assourdissant. Et ils couraient presque. Derrière eux c’étaient les flammes crépitantes, l’immense brasier de l’île que le feu dévorait vive ; devant eux la nuit profonde des eaux. Ils allaient vers la nuit. L’instant d’après, la distance avait diminué de vingt mètres. Le chef eut la sensation que tout l’immense océan se jetait au-devant d’eux pour les engloutir. Déjà ils étaient enveloppés de son haleine fraîche et grisante ; et peut-être une telle mort lui eût-elle souri, à lui. Mais elle, il fallait qu’elle vécût, il fallait qu’elle fût sauvée !

Il fit un effort surhumain, réussit à immobiliser les porteurs l’espace de quelques secondes, leur montra une fois de plus le halo lumineux où s’inscrivait la silhouette du yacht ; puis, il prit le vieux lémurien par l’épaule et le poussa dans cette direction. Mais au bout de quelques