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apparaissait toute rose et toute verte, faisant comme une ceinture éclatante à un délicat écran de petites montagnes boisées aux découpures plus riantes que sévères, et qu’on eût prises, à cette distance, pour un éventail de plumes vertes : bref, un pastel, une miniature, cette île perdue, désignée sur les tablettes spéciales de nos révoltés, par la plus algébrique et la plus énigmatique des lettres de l’alphabet.

Les yeux de ma femme, très grands, très bleus, d’un bleu violet, ont une étonnante faculté de réfraction. Tels yeux féminins reflètent le ciel, la mer, tout ce qu’ils contemplent, les siens brisent les faisceaux lumineux aussi sûrement qu’un prisme et n’en gardent qu’une sorte de poussière lumineuse tout au fond des prunelles. C’est du moins tout ce que j’ai trouvé chaque fois que j’ai plongé dans son regard et c’est bien je crois cette puissance de réfraction de ses yeux qui fait qu’on ne sait jamais ce qu’elle pense. Après cela vous me direz que les yeux des autres femmes sont généralement de vrais miroirs, mais qu’on ne sait pas davantage ce qu’elles pensent, puisque les miroirs ne pensent pas, et nous serons encore d’accord.

Quand j’aurai ajouté que ma femme semble une petite fille par la taille, mais que la dureté