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la misère nous accable, la barbarie, l’ignorance et la brutalité nous ôtent toutes les douceurs de la vie ; mais dans l’ordre du gouvernement, la raison exerce son empire, la paix revient au monde, la sûreté publique est rétablie, les richesses abondent, on goûte les charmes de la conversation, on voit ressusciter les arts, fleurir les sciences, la bienséance est rendue à toutes nos actions et nous ne vivons plus ignorants des lois de l’amitié.


II. Aristote, au septième livre de ses politiques, cha­pitre XIV, dit qu’il y a deux sortes de gouvernements, dont l’un regarde l’avantage du souverain et l’autre celui des sujets. Comme s’il y avait deux espèces de républiques, l’une en laquelle les peuples sont maltraités et l’autre en laquelle ils respirent un air plus libre et une douceur plus grande : mais il se faut bien donner garde de lui accorder cette prétendue distinction. Car les commodités et les incommodités qui naissent du bon ou du mauvais gouver­ne­ment, sont communs au souverain et aux sujets. Les inconvénients qui arrivent à quelque particulier par son infortune, par sa sottise, par sa négligence, par sa paresse, ou par ses débauches, peuvent bien être séparées des incommodités de celui qui gouverne l’État, et ce ne sont pas les défauts du gouvernement public, puisqu’ils peuvent arriver partout également. Mais, s’ils se rencontrent dès la première fondation de l’État,