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qui prouvent cette vérité. Il faut donc savoir que ces termes de bien et de mal sont des noms imposés aux choses, afin de témoigner le désir ou l’aversion de ceux qui leur donnent ce titre. Or les appétits des hommes sont très divers, suivant que leurs tempéraments, leurs coutu­mes, et leurs opinions se rencontrent divers ; comme il est tout manifeste aux choses qui tombent sous les sens, sous le goût, sous l’odorat, ou sous l’attouchement ; mais encore plus en celles qui appartiennent aux actions communes de la vie, en laquelle ce que l’un loue et nomme bon, l’autre le blâme et le tient pour mauvais ; voire, le même homme en divers temps approuve le plus souvent, et condamne la même cho­se. Mais de cette discordance il est nécessaire qu’il arrive des dissensions, des que­relles et des batteries. Les hommes donc demeurent en l’état de guerre, tandis qu’ils mesurent diversement le bien et le mal, suivant la diversité des appétits qui do­mi­ne en eux. Et il n’y en a aucun qui ne reconnaisse aisément que cet état-là, dans lequel il se voit, est mauvais, et par conséquent que la paix est une bonne chose. Ceux donc qui ne pouvaient pas convenir touchant un bien présent, conviennent en ce qui est d’un autre à venir ; ce qui est un effet de la ratiocination : car les choses présentes tombent sous les sens, mais les futures ne se conçoivent que par le raisonnement. De sorte que la raison