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accoutumés peut-être à mépriſer les hommes. Ils les regardent trop comme des eſclaves courbés par la nature, tandis qu’ils ne le ſont que par l’habitude. Si vous les chargez d’un nouveau poids, prenez garde qu’ils ne ſe redreſſent avec fureur. N’oubliez pas que le levier de la puiſſance n’a d’autre appui que l’opinion ; que la force de ceux qui gouvernent n’eſt réellement que la force de ceux qui ſe laiſſent gouverner. N’avertiſſez pas les peuples diſtraits par les travaux, ou endormis dans les chaînes, de lever les yeux juſqu’à des vérités trop redoutables pour vous ; & quand ils obéiſſent ne les faites pas ſouvenir qu’ils ont le droit de commander. Dès que le moment de ce réveil terrible ſera venu ; dès qu’ils auront pensé qu’ils ne ſont pas faits pour leurs chefs, mais que leurs chefs ſont faits pour eux ; dès qu’une fois ils auront pu ſe rapprocher, s’entendre & prononcer d’une voix unanime : Nous ne voulons pas de cette loi, cet uſage nous déplaît ; point de milieu, il vous faudra par une alternative inévitable, ou céder ou punir, être foibles ou tyrans ; & votre autorité déſormais déteſtée ou avilie, quelque parti qu’elle pren-