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LETTRE IX.

Roman de Clélie.J’Observerai pour le Roman de Clélie ; dont je vais, vous rendre compte, Madame, la même méthode que j’ai ſuivie en vous faiſant connoître le grand Cyrus. Mlle de Scudéri, dont le principal talent eſt d’embellir les Hiſtoires les plus anciennes, & de les revêtir de tous les ornemens de l’invention, a fait d’une jeune Romaine, la plus parfaite, la plus belle, & pour me ſervir des expreſſions de l’Auteur, la plus incomparable perſonne qui fut jamais.

Vous ſçavez que Tarquin, Roi de Rome, s’étant rendu odieux par ſes cruautés & par ſon orgueil, on chercha les moyens d’affranchir la Patrie de ſon joug tyrannique : Sextus ſon fils en fournit bientôt l’occaſion. Ce Prince conçut pour Lucrece cette paſſion que tout le monde connoît, qui coura à cette Romaine l’honneur & la vie, & aux Tarquins la perte de leur Couronne. C’eſt ſur ce fonds que Mlle de Scudéri a compoſé ſon Roman ; elle n’a ſait que donner, pour ainſi-dire des nuances romaneſques aux caractères des différens perſonnages de cette Hiſtoire.

Le vaillant Aronce & la belle Clélie, touchoient au moment d’être heureux ; le jour deſtiné à leur mariage étoit arrivé : les préparatifs en étoient faits, lorſqu’un bruit eſſroyable ſe ſait en- tendre ; la terre mugit, s’agite, s’entrouvre : des nuages de pouſſiere & de fumée s’élevant dans les airs, nos deux Amants ſont ſéparés l’un de