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était inconnu, loin des chiens et des chasseurs. Il erra toute la journée sans pouvoir retrouver son chemin. Enfin le soleil était près de son déclin, lorsqu’il avisa un charbonnier :

« Dis-moi, bonhomme, — lui dit le comte, — connais-tu un chemin pour aller au château de Loches ?

— Seigneur, dit le paysan, si je ne le connaissais pas je n’irais pas si souvent y vendre mon charbon.

— Eh bien, conduis-moi donc par tes sentiers jusqu’au chemin public.

— Vous êtes bien à votre aise sur votre cheval, seigneur, et votre esprit n’est point inquiet de ce que vous mangerez, et de ce que vous vous mettrez sur le corps. Moi, si j’interromps mon travail, je mourrai de faim avec ma pauvre famille.

— Ne t’inquiète pas, bonhomme ; viens, je te prie ; je te paierai le temps que je te ferai perdre. »

Et le bon seigneur l’enleva et le mit en croupe sur son cheval.

En chemin, l’on causa :

« Et que dit-on de notre comte, mon brave ?

— En ce qui le concerne, nous n’en disons et n’en pensons que du bien. Il est ami de la justice, gardien de la paix, vainqueur de ses ennemis, bienveillant aux opprimés. Mais, malheur à nous ! à son insu nous avons bien des ennemis, d’autant plus terribles qu’ils sont plus cachés, ennemis domestiques, auxquels nous ne pouvons ni résister ni échapper.

— Et quels sont ces ennemis ? Le comte ne pourrait-il empêcher leur conduite coupable ?

— Oui, sans doute, il le pourrait, puisque tout cela se fait sous couleur de son service ; ce sont les préposés de sa cour, et les autres ministres. Quand il vient dans ses