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ment renfermé, du vieux mot estoer, estoier, mettre dans un étui, estoi.

Ce cachot n’a rien d’intéressant que sa porte assez bien conservée, un vrai type de porte de prison, munie de bandes de fer et de serrures à donner le frisson. Tout autour des murs un prisonnier a écrit alternativement sur chaque pierre, à hauteur d’homme, les mots Jhesus Maria. Une croix sculptée au couteau se voit en face de la fenêtre.

Quelques pas encore, et nous sommes dans les souterrains. Nous devons l’avouer, ce n’est pas sans une certaine hésitation que nous abordons cette partie de notre travail. Il nous en coûte de porter une lumière profane dans cette ombre mystérieuse, et de dépouiller les oubliettes de leur vieille réputation de ténébreuse horreur. Nous nous souvenons encore du temps où nous frémissions au récit de ces vieilles légendes, lorsqu’on nous montrait la place où se trouvaient ces ouvertures terribles, avec des roues garnies de pointes, de poignards, de lames de rasoirs, etc., sur lesquelles on précipitait un homme… Son cadavre allait tomber dans de la chaux vive, où il disparaissait pour jamais ! Cela ressemblait à un conte de Perrault, — et des gens affirmaient sérieusement avoir vu les restes de ces affreuses machines !

Nous laisserons aux romanciers le soin de jeter les couleurs brillantes ou sombres de leur imagination sur des histoires aussi étrangement fantaisistes ; notre devoir est de n’admettre que les faits reposant sur des données sérieuses et sévèrement contrôlées.

On sait combien les véritables oubliettes sont rares. La Bastille même, ce modèle de prison terrible, n’en possédait pas. M. Viollet-le-Duc, dans son Dictionnaire d’architecture, en cite deux exemples seulement ; pour les autres, il a