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INTRODUCTION.

nulle autre pareille. Cette puissance n’est plus aujourd’hui ce qu’elle était, et nos enfants eux-mêmes ne la comprennent pas. Nous sommes des reines sans royaume, et nous ne savons plus dire même si nos fronts ont porté couronne…

À l’époque de madame Necker, l’esprit de société, le besoin de réunion, celui des égards et de la louange réciproques, avaient alors élevé un tribunal où tous les hommes de la société étaient obligés de comparaître. Là, l’opinion publique, comme du haut d’un trône, prononçait ses arrêts et donnait ses couronnes. On marquait du signe réprobateur celle ou celui qui se montrait en faute. L’empire de l’opinion, enfin, était immense, et cet empire était gouverné par une femme. C’était la maîtresse d’un salon qui présidait aux jugement qu’on rendait chez elle ; c’était avec son esprit, son bon goût, qu’on les rédigeait, et son cœur, toujours à côté de son esprit, empêchait que celui-ci ne prît une fausse route.

En France, particulièrement, c’est le grand ascendant de l’opinion publique qui souvent oppose un obstacle à l’abus de l’autorité. Louis xiv la craignait ; Louis xv et Louis xvi se faisaient rendre un compte exact des plus petites conversations de Paris pour juger par elles de l’esprit de la ville, de cet esprit qui forme un tout appelé