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HISTOIRE DES

mais auec vne tresheureuſe iſſue. Ayant icy faict quelque ſeiour auec les nouuellement baptiſez, il s’achemina droit à Meaco ville capitale du Royaume, diſtante enuiron trois cens lieuës de Cangoxima, & là où Ieſus Chriſt n’auoit onques eſté cogneu. Il commença ce voyage le mois d’Octobre, ſur le point que les froidures ſe rengregent au Iapon, & y ſont les neiges & gelees ſi grādes & prodigieuſes, qu’on diroit que les glaçons pendus aux arbres parmi les foreſt, ſont autant de groſſes poutres de bois, & s’il luy aduint ſouuent de paſſer là où les brigans eſcumoyent la mer, & par fois les mariniers meſmes le feirent deualer iuſques à l’eſgout & ſentine des Nauires, pour leur ſembler eſtre vn homme nouueau, de nulle eſtime, & valeur. Que s’il luy faloit voyager par terre, de peur de faillir le chemin, il ſuyuoit de pleine courſe les gens du païs qui alloyent à cheual, mais à beau bied nud, pour paſſer à gue les groſſes riuieres, qui en ceſte ſaiſon de l’annee ordinairement ſe deſbordent. Ce trauail eſtoit de ſorte, que le poure Xauier auoit les pieds tous enflés de neige & de froidure, & puis ayant en vn fardeau ſur ſoy, les accouſtremens pour dire la Meſſe, & les chemins eſtāt bien fort gliſſans, & comme vitrés de verglas, il tomboit chaque coup à terre. Le ſoir, quand il eſtoit tems d’he-