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Histoire


traduites, manifestées aussi bien dans les lois que dans les diverses formes de la vie. Si donc la nature du sujet nous impose un cadre, c’est celui-là que nous devons choisir ; de la sorte, nous sommes sur de ne pas égarer le lecteur par de vaines hypothèses.

L’esclavage résultant, comme nous l’avons démontré, de la constitution de la propriété îndividuelle, les esclaves, par le fait même des choses, ne durent être d’abord que de purs instruments de production. Dans la suite, sans doute, le vainqueur fit de l'esclave une chose ductile et obéissante, qu’il s’efforça d’appliquer à tout, à ses plaisirs comme à ses caprices, à ses vices comme à ses crimes. L'exploitation de l'homme par l'homme, une fois établie, devait nécessairement parcourir le cercle de la folie. Cependant la mission première de l’esclave dut être le travail, et le travail matériel dans toute l’acception du mot. Causé par la propriété individuelle, il ne fut conservé que pour entretenir et féconder cette même propriété, au point qu’un esclave, un boeuf, un instrument aratoire, durent finir par s’identifier complètement dans l’esprit des maîtres ; c'est ce qui eut lieu en effet. L’idée du travail, dans toute l’antiquité, se liait tellement à celle de l’esclave, que celui-ci n’existait réellement qu'en tant que valeur productive. Un bœuf, dit Aristote, tient lieu d’esclave au pauvre[1]. Caton, énumérant les moyens nécessaires à l'exploitation de deux cent quarante jugères plantées en vignes, soutient qu’il faut 13 esclaves, 3 bœufs, 4 ânes, 100 brebis, 5 vases à huile[2]. Varron, à son tour, reconnaît trois sortes d’instruments agricoles : 1° l’instrument vocal, ou les esclaves ;

  1. Pol., 1, 6.
  2. De l'agriculture, 10