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tion de la figure d’Ahasvérus, cite une tradition allemande tirée des Souvenirs d’un pèlerinage en l’honneur de Schiller :

« On raconte qu’un jour, sur le marché de Francfort, parut le Juif-Errant. »

« Un homme à barbe grise, à demi vêtu d’une tunique déchirée, coiffé jusque sur les yeux d’un sale turban, et qui paraissait exténué par de longs voyages, s’approcha d’un fripier. Après avoir retourné toute sa boutique, il choisit une robe de samit, fourrée de menu-vair et la regarda au jour ; il la rendit, puis la reprit, la laissa, la reprit encore et la marchanda. Le fripier, qui le reconnut pour un Juif, à son avarice et à sa ténacité, lui jura, par les yeux du Christ, qu’il ne pouvait rien rabattre de son prix.

« Le vieillard soupira douloureusement, détourna la tête, s’empara de la robe, et, présentant au marchand une pièce d’or à l’effigie de Tibère, lui dit : — Voilà votre compte. — Cette monnaie n’a pas cours dans l’empire, dit le fripier. — Il y a cependant mille quatre cents ans qu’elle a été frappée à Rome, répondit le Juif, et c’est alors que je l’ai reçue.

« Le fripier épouvanté fit le signe de la croix. — Oh ! répondez, s’écria-t-il, n’êtes-vous pas le Juif-Errant ? L’étranger avait disparu. »

Mais des esprits plus perspicaces, de ceux qui vont au fond des choses et ne se contentent pas d’affirmations banales, allaient, à l’exemple du jurisconsulte Louvet, émettre également des doutes.

Un historiographe du roi de France, avocat au Parlement de Paris, R. Bouthrays (Botereius), mentionne la venue du Juif-Errant à Hambourg, en 1566 ; il craint, dit-il, qu’on ne lui reproche de s’arrêter ainsi à des contes ridicules, quoiqu’il soit question de ce personnage dans toute l’Europe.